Chaque citoyen ou personne morale peut s’adresser à l’adjoint du gouverneur pour introduire une plainte s’il considère que la loi sur l’emploi des langues n’est pas respectée dans une des communes périphériques. Dans ce cadre, la loi prévoit une fonction de médiation.
La quote-part des plaintes et des demandes d’avis ou d’information formelles s’élève à 4 % du volumetotal pour la période couverte par ce rapport d’activités. 1 dossier sur 5 se rapporte à une plainte introduite formellement. Dans un cas seulement, la personne ayant introduit le dossier a demandé explicitement à l’adjoint du gouverneur d’intervenir auprès du service public concerné. Toutefois, dans ce cas précis, l’adjoint du gouverneur était territorialement incompétente et a référé le citoyen concerné à l’organe de contrôle général, à savoir la Commission permanente de Contrôle linguistique. Durant cette même période, aucune procédure de médiation ne fut entamée.
Comme dans les périodes couvertes par les relevés antérieurs, le service fut essentiellement contacté en néerlandais. Un peu plus qu’un dossier de plainte sur 10 fut introduit en français. Pour les autres dossiers, la proportion est encore inférieure à ce chiffre, à savoir 8 % – 2 dossiers sur 25 – , un pourcentage assez bas par rapport aux autres périodes, dans lesquelles le nombre des dossiers en français fluctuait autour des 23 %.
Ces chiffres ne donnent bien évidemment pas une image fidèle de l’appartenance linguistique des personnes qui ont contacté le service, ils ne constituent qu’une indication de la langue dans laquelle la plainte ou la question fut formulée. En effet, le service reçoit également des demandes de services publics, de particuliers n’habitant pas une commune périphérique ou de citoyens francophones qui formulent leur demande en néerlandais.
Il ressort clairement du graphique de droite que depuis 2010-2011, la majorité des plaintes est introduite en néerlandais.
Les dernières années, les plaintes formelles furent surtout introduites par des habitants ou des services établis dans une commune périphérique. Toutefois, tel ne fut pas le cas pour la période 2014-2015: 22 % environ – 1 plainte sur 5 – peut être ‘attribué’ à une commune périphérique, alors que pour les périodes couvertes par les 3 rapports d’activités précédents, il s’agissait encore de plus de 70 %. C’est la première fois que ce pourcentage passe en dessous des 50 %.
Cette diminution est encore plus accentuée si on la compare aux dix premières années (1995-2004), quand environ 89 % des plaintes étaient introduites par des habitants des communes périphériques ou par des services y établis.
Pour la période couverte par ce rapport d’activités, un peu plus de la moitié des demandes d’information, à savoir 58 %, fut introduite par des habitants ou des services établis dans des communes périphériques. Ce pourcentage correspond à ce que nous avons pu constater pour les années précédentes. Les autres demandes d’information furent introduites par des habitants ou par des services établis, pour la plupart, dans les autres communes de la Région flamande.
Dans la loi sur l’emploi des langues, les services publics sont répartis en fonction de leur champ d’action. En fonction de ce dernier, ces services sont qualifiés de service local, régional ou central, une qualification à laquelle sont à chaque fois liés différents prescrits linguistiques. Si les services centraux utilisent dans leurs contacts avec les citoyens la langue de ces derniers, à savoir une des trois langues nationales, le choix linguistique des services régionaux et locaux dans leurs contacts avec les citoyens est limité. En effet, hormis la liberté linguistique initiale du citoyen, il faut également tenir compte d’un deuxième facteur important, à savoir le statut linguistique de la région ou de la commune dans laquelle le service public est établi.
La réforme de la structure de l’état, transformant progressivement la Belgique en état fédéral, a créé une nouvelle catégorie, à savoir les services instaurés par les Communautés et les Régions. Ces services ne tombent pas sous le dénominateur ‘services régionaux’ dont question dans la loi sur l’emploi des langues, mais sont réglés par 3 lois:
Ces dispositifs normatifs renvoient pour une large part aux dispositions de la loi sur l’emploi des langues.
Bien que la loi sur l’emploi des langues ne prévoie pas de qualification spécifique pour les entreprises publiques autonomes, nous considérons ce genre de services, depuis le rapport d’activités précédent, comme une catégorie à part. Les entreprises publiques s’occupent non seulement d’un bon nombre d’activités commerciales mais également de certaines missions d’intérêt public; des missions qui sont considérées comme essentielles pour les citoyens et la société. Tout comme leurs filiales, qu’elles impliquent dans l’exécution de leurs missions de service public et dans lesquelles l’intérêt des pouvoirs publics dans le capital dépasse les 50 %, les entreprises publiques tombent sous l’application de la loi sur l’emploi des langues. En fonction du contexte, ces entreprises publiques peuvent parfois être qualifiées de services centraux, régionaux ou locaux.
Leur statut dual peut également mener à ce qu’elles soient considérées comme régies par la loi sur l’emploi des langues dans une certaine situation alors que tel n’est pas le cas dans un autre contexte. Un service orienté vers les clients constitue un facteur de succès pour ces entreprises qui déploient leurs activités dans un marché privatisé. Les clients et les futurs clients s’attendent à ce qu’ils soient servis et informés dans leur propre langue. Ils seront vite tentés de faire appel à un joueur privé sur le marché si l’entreprise publique ne répond pas suffisamment à ce besoin. Ces entreprises doivent donc parfois chercher un équilibre délicat entre les règles et droits linguistiques d’une part, un bon service clientèle d’autre part.
Un constat frappant: presque la moitié (44 %) des plaintes formelles concerne des acteurs qui sont actifs dans les entreprises (entreprises privées et publiques). Bien que le principe de la liberté linguistique domine dans la vie des entreprises, les citoyens attendent des entreprises privées qu’elles appliquent les règles linguistiques auxquelles sont soumises les pouvoirs publics. En 2010-2011, la proportion de plaintes formelles contre une entreprise privée s’élevait à 15 % environ; en 2012-2013, elle est passée à 19 % et pour la période couverte par ce rapport d’activités, le taux est monté jusqu’à 33 %.
Bien que les entreprises privées ne soient généralement pas soumises à des obligations linguistiques dans les contacts avec leurs clients, dans leurs dépliants publicitaires, etc., elles doivent néanmoins tenir compte des règles linguistiques quand elles collaborent avec un service public38, dans leurs relations sociales (employeur-travailleur),39 dans leurs contacts avec l’administration40 et dans le cadre de la protection des consommateurs41. Vous trouvez plus d’informations à ce sujet dans la rubrique 'La législation linguistique dans les entreprises' de ce rapport.
En ce qui concerne les plaintes à l’encontre de services locaux, l’adjoint du gouverneur a dû déclarer une plainte relative aux élections (envoi de la lettre de convocation) comme fondée pro forma. En effet, la plainte avait été introduite au moment où le ministre compétent avait annulé la décision du conseil communal relative à l’envoi des convocations. Par ailleurs, l’adjoint du gouverneur n’était pas compétente pour imposer une sanction disciplinaire au bourgmestre en question comme demandé par le plaignant.
Une autre plainte contre l’administration communale d’une commune périphérique portait sur la langue des instructions qui apparaissent sur l’interface lors de l’activation d’une carte d’identité électronique au guichet communal. En l’espèce, le problème se situait au niveau du service compétent du SPF Intérieur qui gère le système Belpic et non au niveau de l’administration communale. Ledit service du SPF Intérieur fit savoir que le logiciel serait adapté, de sorte que dans une version ultérieure, la langue utilisée sur la carte d’identité introduite apparaisse immédiatement sur le lecteur.
Quant aux autres dossiers, nous retrouvons essentiellement les mêmes services: services locaux, entreprises privées et entreprises publiques, bien que notre service ait également été contacté concernant l’emploi des langues des services régionaux.
Tout comme dans la période couverte par le rapport d’activités précédent, le service reçut des questions concernant la langue à employer par un service public dans des contrats qui se situent plutôt dans le droit privé, p.e. un contrat de location ou une convention d’utilisation. Pour plus d’informations, nous vous renvoyons à la rubrique 'La législation linguistique dans les entreprises' de ce rapport.
En outre, le service se vit également confronté aux suites des arrêts du Conseil d’État du 20 juin 2014.42
En effet, certains citoyens envoyèrent à leur administration communale une demande pour recevoir leurs documents administratifs dorénavant en français pour une période de 4 ans. Des questions surgirent dès lors quant à la concrétisation – dans quelle mesure et comment – de la décision du Conseil d’État, concrétisation qui nécessite également de tenir compte des circulaires flamandes Peeters, Keulen et Bourgeois (ces questions sont traitées plus en détail dans la rubrique 'Enregistrement du choix linguistique' de ce rapport).
Les autorités entrent en contact avec les citoyens de diverses façons. La loi sur l’emploi des langues organise ces contacts en des actes de genres différents. En outre, les contacts entre les différents services publics et entre les fonctionnaires d’un service déterminé sont également soumis à des règles.
Les prescrits relatifs à l’emploi des langues diffèrent en fonction de l’acte. La loi distingue les avis et communications au public (il s’agit ici de messages généraux, non personnalisés, identiques pour plusieurs destinataires), les rapports avec des particuliers (des messages individualisés à l’attention d’un destinataire spécifique, e.a. dans le cadre du traitement d’un dossier), les formulaires et autorisations, les attestations et les actes.
La langue utilisée entre les fonctionnaires et entre les différents services publics relève de la notion d’ ‘emploi des langues interne’. La loi sur l’emploi des langues impose dès lors aux fonctionnaires qu’ils disposent de certaines connaissances linguistiques.
La majorité des dossiers (plaintes et autres dossiers) concerne les ‘rapports avec des particuliers’ et les ‘avis et communications au public’. L’emploi des langues entre les services et l’emploi des langues interne sont à l’origine de moins de questions.
Dans certains dossiers, le service ne procède à aucune qualification, par exemple lorsqu’il s’agit d’un acte sur lequel aucune desdites qualifications n’est applicable. Pensons notamment aux connaissances linguistiques ou à l’emploi des langues d’une caissière dans un commerce. Dans ce cas, il n’est pas question d’un service public ou d’une entité soumise à la loi sur l’emploi des langues, ni des prescrits relatifs aux relations sociales entre employeur et travailleur (article 52 de la loi sur l’emploi des langues). Il va de soi que l’adjoint du gouverneur n’est pas compétente pour ce genre de dossiers.
Le service reçut également des demandes d’information concernant la possibilité de faire traduire certains documents tel que prévu par l’article 13 de la loi sur l’emploi des langues. En effet, la loi prévoit que, dans certaines conditions, les citoyens peuvent introduire une demande de traduction auprès du gouverneur.
Les plaintes sont déclarées irrecevables (11 %) lorsqu’elles sont introduites anonymement ou lorsqu’elles se rapportent à des faits datant de plus d’un an. Si une même plainte est introduite par le même plaignant endéans le délai d’un an et sans que de nouveaux faits se sont produits, cette plainte est également déclarée irrecevable.
L’adjoint du gouverneur se déclara incompétente pour 56 % des plaintes introduites. Elle se basa entre autres sur la localisabilité ou sur la matière concernée. Certains griefs formulés tombent plutôt dans le champ de la liberté linguistique garantie par la Constitution ou encore sous une autre réglementation, par exemple la réglementation relative à l’emploi des langues en matière judiciaire. En outre, faute de lien avec une commune périphérique, l’adjoint du gouverneur se déclara incompétente dans un nombre assez élevé de cas.
Lorsque l’adjoint du gouverneur se déclare incompétente, le plaignant est orienté vers l’instance compétente en la matière chaque fois que c’est possible. Dans les autres dossiers, le plaignant est informé de la raison pour laquelle l’adjoint du gouverneur n’a pas pu traiter ou transférer son dossier à une autre instance.
Seuls les dossiers de plainte pour lesquels l’adjoint du gouverneur est compétente peuvent être examinés et clos. 67 % des plaintes fut déclaré fondé. En général, la situation fut rectifiée, ou une solution fut annoncée. Les plaignants concernés furent systématiquement informés du suivi de ces actions.
Dans 33 % des plaintes introduites pour lesquelles l’adjoint du gouverneur s’est déclarée compétente, aucune violation de la législation ne put être constatée, l’autorité concernée avait agi conformément à la législation sur l’emploi des langues.
Dans 86 % des autres dossiers environ (demandes d’avis, demandes d’information …), la personne concernée reçut l’information nécessaire, soit sous forme d’un avis circonstancié dans lequel la problématique fut généralement abordée de plusieurs points de vue, soit sous forme d’une réponse succincte. La personne concernée reçut également une brève explication de la réglementation en vigueur lorsque sa question se rapportait à une matière pour laquelle l’adjoint du gouverneur n’est pas compétente, ou quand aucune autre instance n’était compétente en la matière. 43 Environ 14 % des personnes ayant introduit une demande fut renvoyé vers le service compétent en la matière.
Ceci nous amène finalement à l’aperçu général concernant la clôture de tous les dossiers.
Comme les années précédentes, la majorité des dossiers fut introduite par mail (51 %). 27 % des plaintes et des demandes d’avis ou de renseignements fut introduit par téléphone. Le restant des dossiers fut introduit via le site web (9 %), par lettre (7 %) ou déposé personnellement (6 %).
Dans la mesure du possible, l’adjoint du gouverneur tâche de finaliser les dossiers dans un délai de 16 jours, un délai de traitement que le service s’est imposé. Il va de soi que cette période de référence ne concerne que les dossiers pour lesquels toutes les données sont immédiatement disponibles. S’il s’avère nécessaire de contacter la personne et/ou les autorités concernées pour obtenir plus d’information, il est plus difficile de respecter ce délai.
Durant la période 2014-2015, 73 % des dossiers purent être finalisés dans le délai de 16 jours. 9 % des dossiers furent traités dans un délai d’un mois et 13 % dans un délai de 2 mois. Un faible pourcentage des dossiers (4 %) nécessita un délai de traitement plus long.
Notes de bas de page:
38 Loi sur l’emploi des langues, article 50.
39 Loi sur l’emploi des langues, article 52.
40 Loi sur l’emploi des langues, article 52.
41 Les obligations linguistiques relatives à la protection du consommateur sont reprises au Code de droit économique, livre VI « Pratiques du marché et protection du consommateur », voir entre autres l’article VI.8. L’adjoint du gouverneur n’est pas compétente en la matière. Pour plus d’informations, voir https://economie.fgov.be/fr/themes/protection-des-consommateurs
42 C.E., 20 juin 2014, arrêts 227.775 et 227.776.
43 Ce qui est par exemple le cas pour des faits qui tombent sous la liberté linguistique garantie par la Constitution.