Enregistrement linguistique

Rapport d'activités 2020-2021 - Choix linguistique et enregistrement linguistique

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Selon l’Assemblée générale du Conseil d’État, les habitants des communes périphériques peuvent demander à leur administration de prendre en compte leur demande d’être servis en français, pendant une période de 4 ans. La demande peut uniquement être formulée au moyen d’une lettre envoyée ou remise en main propre à leur administration communale à cet effet. L’Assemblée générale considère que l’une ou l’autre forme d’enregistrement de cette préférence pour le français doit donc être possible.

Si les communes sont autorisées à informer leurs habitants de cette possibilité, elles ne peuvent en aucun cas les inciter en leur envoyant un modèle de lettre ou un toutes-boîtes avec un formulaire de choix.1

Note de bas de page

1 C.E., e.a. arrêt 227.775 du 20 juin 2014; 17 mai 2018, arrêts 241.512-241.514.


En mars 2021, la question fut posée de savoir si les services communaux d’une commune périphérique pouvaient tenir compte des demandes des particuliers d’utiliser le français dans leurs contacts avec l’administration, si celles-ci étaient soumises via un formulaire distribué par un parti politique. Le recto du pamphlet (bilingue) contenait des informations sur le point de vue de l’Assemblée générale du Conseil d’État; le verso était un formulaire que les habitants pouvaient utiliser pour demander à la commune d’employer désormais le français durant une période de 4 ans.

La commune se posa des questions, d’une part quant au fait qu’un formulaire avait été utilisé au lieu d’une lettre, et d’autre part quant au fait que ce formulaire avait été diffusé par un parti politique

De nombreuses demandes peuvent être valablement soumises aux services publics via des formulaires à remplir. Une pratique qui devient d’ailleurs de plus en plus courante par l’utilisation des guichets numériques. L’utilisation d’un formulaire à remplir ne conduit donc pas nécessairement à l’invalidité de la demande.

L’important, c’est que la demande soit individuelle, qu’elle porte une signature authentique et qu’elle soit clairement formulée. La demande doit également contenir suffisamment de données permettant une identification claire du demandeur.

L’initiative d’envoyer des formulaires ou des lettres types ne peut en aucun cas émaner des services communaux. Le Conseil d’État est clair à ce sujet:
« l’intervention des communes doit pour l’essentiel rester passive et receptive ».1

Dans ce cas précis, les formulaires étaient envoyés par un parti politique et l’un des signataires était membre du conseil du CPAS.

Un parti politique est une association de personnes physiques qui, en participant aux élections, cherchent à mettre en œuvre leur vision de la manière dont les problèmes sociétaux doivent être abordés. Les partis politiques représentent leurs électeurs et défendent leurs intérêts.

Selon la Cour européenne des droits de l’homme, les partis politiques sont essentiels au fonctionnement de la démocratie. En outre, le principe de la liberté d’expression s’applique à la propagande politique ; un droit fondamental garanti non seulement par la Constitution belge, mais également par plusieurs traités internationaux relatifs aux droits de l’homme. Il englobe le droit d’avoir et de transmettre une opinion sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques.

Les mandataires politiques doivent eux aussi pouvoir exercer ce droit. La section de Législation du Conseil d’État déclara dans son avis 45.817 du 3 février 2009 que, lorsqu’un candidat aux élections communales s’adresse à ses électeurs potentiels, il n’exerce pas de fonction administrative et ne participe pas non plus à l’élaboration d’un acte administratif.

Lors de la diffusion d’informations à des fins de propagande politique, il est recommandé qu’un mandataire veille à ce qu’il soit suffisamment clair pour le citoyen qu’il n’agit pas en tant que mandataire communal, mais en tant que représentant de son parti. L’adjoint du gouverneur considéra que l’information dans l’en-tête et le pied de page du document indiquait clairement qu’il s’agissait de la prospection politique.

Note de bas de page

1  C.E., e.a. arrêt 241.512, point 23.

À la lumière de l’article 19 de la Constitution et de la volonté expresse de l’habitant, l’adjoint du gouverneur considéra qu’il était problématique de refuser des formulaires de demande parce qu’ils faisaient initialement partie d’un pamphlet politique. En effet, la demande était clairement formulée sur le formulaire, sans aucune référence aux informations au verso du document. La signature et les informations d’identification remplies à la main, y compris le numéro du registre national, l’adresse e-mail et le numéro de téléphone ou de GSM, rencontraient d’ailleurs toutes les exigences pour l’enregistrement d’un choix linguistique individuel telles que déterminées par le Conseil d’État.

Toutefois, l’adjoint du gouverneur attira l’attention sur la position du gouvernement flamand: en attendant la décision finale du Conseil d’État sur les recours contre l’annulation de la décision de trois communes périphériques d’implémenter un système d’enregistrement linguistique, le gouvernement flamand est d’avis que les circulaires flamandes restent pleinement d’application.